Poésie élégiaque - Callinos
Poètes élégiaques
traduits par
Yves Gerhard
Callinos d’Éphèse
Le plus ancien des poètes élégiaques grecs exhorte ses compatriotes à relever le défi de la guerre contre les Cimmériens et les Trères, peuples barbares qui tentèrent d’envahir la Lydie vers le milieu du VIIe siècle avant J.-C.
Fr. 1
Le fragment le plus important a été conservé par Stobée (fr. 1). On ignore la longueur de la lacune, après le vers 4. L’édition utilisée ici : M. L. West, Delectus ex iambis et elegis Graecis, Oxford, Clarendon, 1980 (réimpr.).
Jusqu’à quand donc dormirez-vous ? Quand prendrez-vous courage, Jeunes hommes ? Vous vous laissez bien trop aller ! Ne rougissez-vous pas devant vos voisins ? Vous croyez Vivre en paix, mais la guerre atteint tout le pays. (…) Que chacun en mourant lance ses derniers traits ! L’honneur et la beauté, pour un soldat, c’est de se battre Pour son pays, sa femme et ses propres enfants, Contre ses ennemis. La mort ne surviendra que lorsque Les Moires* trancheront. Que chacun marche droit ! Qu’il tienne haut sa lance et garde sous son bouclier 10 Son cœur vaillant, dès que commence la mêlée ! Car le destin ne permet pas à l’homme d’éviter La mort, fût-il issu d’ancêtres immortels**. Souvent, s’il échappe au carnage et au fracas des armes, C’est rentré au logis que la mort doit l’atteindre ; Alors, dans son pays, il n’est aimé ni regretté. L’autre, on le pleure, humbles et forts, s’il est tombé ; Le peuple entier regrette d’un soldat vaillant la mort, Mais s’il vit, on l’honore tel un demi-dieu ; Car on le considère à l’égal d’un bastion ; tout seul, 20 Il accomplit des actes comptant pour beaucoup. |
* Les Moires, en latin les Parques, sont les divinités qui filent, puis coupent le fil de la vie, Clôthô, Lachésis et Atropos (littéralement : Fileuse, Destinée et Inévitable).
** Par exemple Sarpédon, tué par Patrocle bien que descendant de Zeus et d’Europe. En revanche, les vers suivants s’appliquent à Agamemnon, qui fut assassiné à son retour en Grèce par l’amant de sa femme, Égisthe.
Fr. 2 et 2a
Zeus, aie pitié de Smyrne ! (…) Si les gens de Smyrne ont brûlé, un jour, en ton honneur, De beaux cuisseaux de bœufs, veuille t’en souvenir ! |
Strabon (XIV, 1, 4), qui cite ces mots, rapporte qu’autrefois Éphèse s’appelait Smyrna et que Callinos dit volontiers Smyrnéens pour Éphésiens. Il parle donc ici à ses compatriotes.
Date de dernière mise à jour : 18/10/2019