Constantin Rhodios

Né probablement entre 870 et 890 à Lindos dans l’île de Rhodes, hypographeus — ὑπογραφεύς i.e. notaire, secrétaire et chargé de mission, c’est probablement en 909/10 que Constantin Rhodios écrivit cette invective contre Léon Choirosphaktès en exil. Ce poème n’est qu’une suite de néologismes décrivant Léon comme un personnage débauché et idôlatre (vv. 5, 7, 15, 27, 28), dans une veine très aristophanesque, en trimètres iambiques.

v. P. Matranga, Anecdota Graeca II (Roma 1850) pp. 624-626.

τοῦ Ῥοδίου Κωνσταντίνου
πρὸς τὸν Χοιροσφάκτην Λέοντα


Ἀλλ' ὡς μακελλεὺς καὶ σφαγεὺς χοίρων πέλων,
κλήσεις ἄκουε σῶν καλῶν σπουδασμάτων,
ὧν ἄξιος πέφυκας δύσμορε κλύειν,
ἐκ σπαργάνων τούτοισιν ἐντεθραμμένος·
Toi qui fais métier de boucher-équarrisseur de cochons,
écoute ce rappel de tes chefs-d’œuvre,
que tu mérites d’entendre, malheureux,
toi qui as été élevé dans ce milieu dès le berceau :

5  ἀλλαντοχορδοκοιλιεντεροπλύτα

laveur de tripoboyaux à saucisses
ὀρνιθοχηνονηττοπερδικοπράτα volailler de canardoie-perdrix
λακτεντοχοιροκριοϐουτραγοσφάγε égorgeur de cochonou-bélier-torobouc
πλαστιγγοζυγοκαμπανοσφαιρωστάτα rogneur de poids et mesures falsificateur de balance
καπηλομηνομετροκαυκαλογλύφε pilier d’auberge qui écluse sa coupe avec la ration du mois
10  λαρυγγοφλασκοξεστοχανδοεκπότα grand-gousier gobeur de flasques d’un setier
κασαλϐοπορνομαχλοπρωκτεπεμϐάτα enculeur de vieille pute qui mouille
ὀλεθροϐιϐλοφαλσογραμματοφθόρε funeste destructeur de livres et falsificateur de documents
σολοικοϐαττοϐαρϐαροσκυτογράφε copiste bègue de barbarosolécismes
καὶ ψευδομυθοσαθροπλασματοπλόκε et plagiaire de récits mensongers pourris

15  Ἑλληνοθρῃσκοχριστοϐλασφημοτρόπε

grécoblasphémateur du christianisme

καὶ παντοτολμοψευδομηχανορράφε

inventeur de ruses et de mensonges audacieux

καὶ τρωκτοφερνοπροικοχρηματοφθόρε

et dévoreur de dots, bouffeur de fric

ἀρρητοποιονυκτεροσκοτεργάτα

noctipratiquant de l’obscurofellation

καὶ νεκροτυμϐοκλεπτολωποεκδύτα

voleur de vêtements et spoliateur de tombes

20  καὶ ταϐλοπεττοϐολοπυργοσυνθέτα

et écrivain lourdaud joueur de dés

βαρϐιτοναϐλοπλινθοκυμϐαλοκτύπε

briquetier cymbalofrappeur de harpobarbiton

καὶ ψαλτοχορδοσαμϐυκοργανοκρότα

et ménestrel gratteur de cordes de harpe

κορνουτοπαρθενοτριϐοψυχοφθόρε

maquereau de vierges cocu destructeur d’âmes

καὶ μοιχοπαιδοδουλοσκανδαλεργάτα

et baiseur dévergondé de petits esclaves

25  πρεσϐευτοκερδοσυγχυτοσπονδοφθόρε

ruineur des gains diplomatiques et briseur de trêves

καὶ κοσμολεθροσυμφοροπλανοσπόρε

mondodestructeur, semeur de malheurs et d’erreurs

λεκανομαντοψευδορηματεκφόρε

fabricant de faux oracles sortis du fond de la cuvette
καὶ ζωοθυτοκαρδιηπατοσκόπε examinateur de cardiofoie de sacrovictime

κακοῦ τε παντὸς ἐργεπιστήμων ξένε·
30  ῥύπασμα κόσμου καὶ γέλως Βυζαντίων·
κοινὸν κάθαρμα τῆς ὅλης οἰκουμένης·
τέκνων ἐραστά, τῶνπερ ἔπειρας τάλας·
φθορεῦ γυνάνδρων, καὶ νέων ἀσωτία·
κακῶν ἁπάντων συμμιγὴς ἀρρωστία.

étranger expert en tout mal,
souillure du monde et objet de rire pour Byzance,
pollution commune à la terre entière,
pédophile, malheureux séducteur d’ados,
briseur de ménage, débaucheur de jeunes gens,
peste accompagnée de tous les maux.


autre exemple de la même veine :

Τοῦ αὐτοῦ πρὸς Θεόδωρον εὐνοῦχον Παφλαγόνα

du même, adressé à Théodore, eunuque paphlagonien

Οὐ γάρ τις αὐτῶν ἀξιόχρεως πέλει,
οὐ χειρὸς ἔργοις, οὐ λόγων κομψεύμασιν,
οὐκ ἐν ποιηταῖς, οὐ τραγῳδιογράφοις·
οὐ τοῖς πλέκουσι τὰς σοφὰς κωμῳδίας·
5  οὐ δεινότητι ῥητόρων γαυρουμένοις·

Car aucun de ces gens n’a de capacité,
ni pour les arts manuels ou les subtilités langagières,
ni ne mérite de figurer parmi les poètes ou les tragiques,
parmi les auteurs des sages comédies,
parmi ceux qui se vantent de leur habileté de rhéteur,

οὐ πεζολέκταις, οὐχ ἁπλῶς λογογράφοις·
οὐ πεντάθλοισιν, οὐκ ὀλυμπιονίκαις·
οὐκ ἐν στρατηγοῖς καὶ δοκίμοις ἀνδράσιν·
οὐκ  ἐν παλαιστραῖς ἢ ποσὶ ταχυδρόμοις,
10  ἀλλ' ἔντ' ἀγύρταις, ἔντ' ἐπιτρίπτοις μόνον·

parmi les prosateurs ou les simples logographes,
les athlètes ou les vainqueurs aux jeux olympiques,
les généraux ou les hommes d’expérience,
ceux qui excellent à la palestre ou à la course ;
on ne les trouve que parmi les mendiants et les coquins,

ἐν ὀστρακοθρύπταισιν, ἐν λιθοξόοις·
ἐν τοῖς προσαίταις, ἐν πενήτων ὁρμαθῷ·

parmi les molluscobroyeurs, les tailleurs de pierre,
chez les mendiants, dans les rangs des pauvres,

ἐν ἀρτοχανδοψωμολεθροπαμφάγοις

chez les omnidévorogobeurs de bouchées de brioche,
ἐν ὀψοποιολαρδοκαπηλεμπόροις les marmitoépiciers trafiquants de lardons,

15  ἐν χοιροκριοταυροϐουτραγοσφάγοις

parmi les égorgeurs de porcinobéliotauroboucobœufs,

ἐν σκομϐροθυνοκυνοδελφιναγρέταις
ἐν λεπτοσαυριδοστρεοκτενοπράταις

parmi les pêcheurs de thons, maquereaux, requins et dauphins, les marchands de friture, huîtres et pétoncles,

ἐν σειροπλεκτοκρομμυοσκορδοπλόκοις

parmi les tresseurs de chapelets d’ails et d’oignons,

ἐν τορνομινοσκυφοϐαυκαλογλύφοις
20  ἐν ἀμπελεργοταφρολισκαρεργάταις

parmi les videurs de bouteilles retourneurs de coupes d’une mine, les piocheurs de viticultosillons,

ἐν μηλολεπτοκαροκαστανοπράταις

les marchands de pommes, noisettes et châtaignes,

ἐν σμερδοσαπρολαρδοταριχεμπόλοις
ἐν κοπροκαλανοπλυτοσκατεκφόροις

les trafiquants de poissons et de lard salé pourris, les laveurs de canalisation d’égoûts évacuateurs de merde,

ἐν ἀρκοπαικτολωποχιτονεκδύταις

les montreurs d’ours chitonodétrousseurs,

25  ἐν κλεπτοτυμϐονυκτεροσκοτεργάταις
ἐν πᾶσιν οἷς ἔνεστι συρφετὸς βίος,
ἐν τοῖσιν ἐστὶν εὐδόκιμον σὸν γένος,

les obscurs nocturnopilleurs-de-tombes,
parmi tous les gens qui mènent une vie populacière.
C’est chez eux que se trouve ton illustre famille,

ὦ βυρσοδεψοπαφλαγὸν * κακὸν τέρας·

ô affreux monstre paphlagotanneur ;

λοιπὸν παλιγκάπηλε, φράττε σὸν στόμα·

alors, petit boutiquier, boucle-la,

30  καὶ χοῖρος ὢν ἄνωθεν ἐκ μακροῦ γένους,

et puisque tu n’es qu’un cochon de long lignage,

καὐτῆς δὲ πάτρας χοιροϐαλανοτρόφου

d’une patrie elle-même glandonourricière de porcs,

τρανῶς ἄκουε χοιροπαφλαγών * νέε,

jeune paphlagotanneur de porcinocuir, écoute bien

καὶ βόσκε χοίρους, ὡς γένος χοίρων πέλων,

et va paître des cochons, toi qui es porcinoracé,

καὶ τρῶγ' ἄκυλον καὶ διαιτῶ κανθάρους,
35  καὶ γαστέρ' ἐξόγκωσον εἰς ὅσον σθένεις,

et gave-toi de glands, nourris-toi de cafards,
fais-toi une panse aussi grosse que tu le peux,

καὶ μὴ λόγους μάτᾳζε χοιρώδεις γράφων,
ἀλλ' ὡς συὸς γέννημα, γρυλλίζειν μάθε,

et ne perds pas ton temps à écrire des cochonneries,
mais rejeton de porc, apprends à grogner,

καὶ σκὼρ μασᾶσθαι καὶ δυσώδη κοπρίαν,
ἕπου τε μητρὶ πυκνὰ πυκνὰ γρυλλίζων·

à mâchouiller de la merde et du fumier malodorant,
cours après ta mère en couinant tant et plus ;

40  ὅταν δὲ καιρὸς τῆς σφαγῆς χοίρων φθάσῃ,
τότε σφαγήσῃ καὐτός, ὡς χοίρων γένος.

et lorsque viendra l’heure d’égorger les cochons,
égorge-toi toi-même, rejeton de cochons.

* cf. Ar. Eq. βυρσοπαφλαγών

Sur la situation des Paphlagoniens à Byzance au 10e s., v. : Cl. MESSIS, « Régions, politique et rhétorique dans la première moitié du 10e siècle : le cas des Paphlagoniens », REtByz 73, 2015, 99-122.

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