Égypte romaine : mœurs

P.Oxy. I, 119 : lettre de Théon à son père ([13 ou 14 janv.] 2e-3e s. apr.)

Le jeune Théon, fâché de ne pas avoir pu accompagner son père à Alexandrie, lui envoie une lettre de menace. Sous le coup de l'émotion, il commet toute une série de fautes (nous donnons les formes correctes en bleu). On constate que la prononciation moderne du grec est déjà en place, ainsi qu'une partie de la morphologie (aoristes en -σες au lieu de -σας).

Relevons aussi que malgré son caractère d'ultimatum, cette lettre se termine se termine par une formule des plus respectueuses, et que le fils signe du diminutif affectueux que lui donne son père, dans un dernier effort de le fléchir.

Voir :
Hengstl, Griechische Papyri aus Ægypten (Tusculum; München 1978), No 82 (trad.all.)

Θέων Θέωνι τῷ πατρὶ χαίρειν.
καλῶς εποιησες οὐκ απενηχες με μετὲ ἐποίησας ἀπενέγκας μετ' ἐ-
σοῦ εἰς πόλιν. η οὐ θελις απενεκκειν με με- εἰ θέλεις ἀπενεγκεῖν
τε σοῦ εἰς Ἀλεξάνδριαν, οὐ μὴ γράψω σε ἐ- μετ' ἐσοῦ σοι
πιστολὴν οὔτε λαλῶ σε οὔτε υιγενω σε, σοι ὑγιαίνω
εἶτα. ἂν δὲ ἔλθῃς εἰς Ἀλεξάνδριαν οὐ
μὴ λάβω χειραν παρὰ [σ]οῦ οὔτε πάλι χαίρω χεῖρα
σε λυπον. αμ μὴ θέλῃς απενεκαι μ[ε], λοιπόν ἄν ἀπενέγκαι
ταῦτα γε[ι]νετε. καὶ ἡ μήτηρ μου εἶπε Ἀρ̣- γίνεται
χελάῳ ὅτι ἀναστατοῖ με, αρρον αὐτόν. μὴ ἄρον
καλῶς δὲ εποιησες. δῶρά μοι επεμψε[ς] ἐποίησας ἔπεμψας
μεγάλα, ἀράκια. πεπλάνηκαν ημως ἐκε[ίνῃ] ἡμᾶς
τῇ ἡμέρᾳ ιβ ὅτι επλευσες. λυπον πέμψον εἴ[ς] ἔπλευσας λοιπόν
με παρακαλῶ σε. αμ μὴ πέμψῃς οὐ μὴ φά- ἂν
γω, οὐ μὴ πεινω· ταῦτα. πίνω
ερωσθε σε εὔχ(ομαι). ἐρρῶσθαί
Τῦβι ιη.
verso ἀπόδος Θέωνι [ἀ]π̣ὸ Θεωνᾶτος υιω. υἱοῦ
Théon, à son père Théon, salut.
Tu a vraiment été super avec moi en m'emmenant pas avec toi en ville. Si tu veus pas m'emener avec toi à Alexandrie, je ne t'écrirai plus de lettre, je t'causerai plus, je te souhaiterais plus la santé. Si tu vas à Alexandrie (scil. sans moi), sois sûr que je ne te serrerai plus la main et que je ne te saluerai plus à l'avenir. Si tu veux pas m'emmenner avec toi, voilà ce qui arrivera. Et ma mère a dit à Archélaos: "Il va me rendre folle, emmène-le". Oui, tu m'a vraiment bien traité! Tu m'a vraiment fait un grand cadeau! des nèfles, oui! Nous avons été séparés ce jour-là, le 12, parce que tu a embarqué (sans moi). Fais-moi donc venir, s'il te plaît. Sinon, je te garantis que je ne mangerai plus, je boirais plus. Na !   Tous mes vœux de sentez.
Le 18 Tybis.
verso À remettre à Théon, de la part de son Théonounet. 

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