DÉMOGRAPHIE DE LA GRÈCE ANTIQUE

Les données ci-dessous sont des moyennes, tirées de l'étude des nécropoles retrouvées en Grèce ancienne pour les chiffres de population et les densités, tirées de l'étude de plusieurs milliers de squelettes pour les âges moyens et les taux de mortalité (chiffres d'après M. GRMEK, Les maladies à l'aube de la civilisation occidentale, ch. 3, pp. 135-177).

POPULATION


Bronze anc.

Bronze réc.

1000 av.

vers 400 av.

1928

Attique




420'000

 

Athènes-Pirée




200'000


continent




2'000'000

2'096'000

Messénie

23'000

178'000




Laconie

26'000

50'000




Péloponnèse *




800'000

1'053'000

Crète

75'000

250'000



386'000

Cyclades

34'000

29'000



130'000

Iles




400'000

308'000

Grèce



1'000000

> 3'000000

6'200'000

Europe



10'000000

20'000000


* Population du Péloponnèse en 1684: 200'000; en 1692: 116'000 (guerre turco-vénitienne); en 1708: 250'000 (renaissance vénitienne); à la fin du 18ème s.: 100'000 (raids des troupes albano-turques).

Aux 4ème et 3ème siècles (époque hellénistique), on constate une stabilité de la population. Mais la proportion des esclaves par rapport aux hommes libres a augmenté; la population des villes a augmenté par rapport à celle des campagnes.

Au 2ème siècle (époque romaine), on constate un grave déclin démographique, lié à une détérioration du niveau de santé de la population.

DENSITÉ (habitants au km2)


Préhist.

Bronze I

Bronze II

Bronze III

5ème s.

Macédoine centrale

0.85

2.5

2.5

4.5


Laconie

0.85

7.5

8

14

33

Messénie

1.77

8

16

63


Crète

1.53

9

26

31


Cyclades

1.20

14

8

12


Méditerranée orientale

 

10

18

30


Au 5ème siècle

Il faut noter des différences de densité importantes selon les régions de Grèce.

Étolie

10-30

Laconie

33

Corinthie

110

Achaïe

10-30

Argolide

36

Attique

160

Thessalie

10-30

Béotie

60






 



Grèce

36

*** Suisse (1987)

160

* Empire romain (2e s.)

15





En calculant les surfaces de blé cultivées, la productivité à l'hectare et la consommation par habitant, on estime que le déficit alimentaire pouvait commencer dès que la densité dépassait 36 hab./km2 ! La Grèce connaissait donc en moyenne un équilibre précaire. Seule la Thessalie, riche plaine à blé à faible densité, bénéficiait d'excédents. Les habitants de la Corinthie et de l'Attique ne pouvaient vivre que grâce à l'industrie (céramique) et au commerce (huile) assurant l'importation de vivres.

LA MORT

Age moyen des adultes au décès

Il s'agit de moyennes établies à partir de l'âge des adultes seulement, relevé sur leurs os

 


hommes

femmes

moyenne

Néolithique I

33.6

29.8


Néolithique III

35.7

28.2


Mésolithique

32

24.9


Bronze I

34.7

29.6

32.1

Bronze II

39.3

31.9

34.7

époque class.

45

36.2

41.7

époque hellén.

42.4

36.5


époque romaine

42.1

31.6

36.8

2ème s. après

40.2

34.6

38

époque byzant.

36.5

31

33.7

moyenne

39.8

31

35.4

Les femmes avaient un âge de décès inférieur aux hommes à cause des problèmes liés à la grossesse, à l'accouchement et à l'allaitement. Entre 5 et 10 % des femmes qui accouchent meurent soit de l'accouchement soit de ses suites.

On note cependant de grandes différences selon les régions, mais surtout selon les classes sociales. Ainsi la classe des aristocrates guerriers retrouvés dans les Cercles A et B de Mycènes (1650-1450) donnent les chiffres suivants : hommes 35,9; femmes 36,1. A la même époque, à Argos, les hommes atteignent en moyenne 40 ans, les femmes 35.

Mortalité infantile

On note en Grèce ancienne, à toutes les époques, une forte mortalité infantile : 20 % (comme dans toutes les sociétés préindustrielles). Environ la moitié des enfants n'atteint pas l'âge de 10 ans.

À l'époque mycénienne, 55% des jeunes meurent avant 1'âge adulte (15 ans).

À Olynthe, à l'époque classique, ce chiffre est encore de 49.7% et la moitié d'entre eux n'a pas atteint l'âge de cinq ans (chiffres identiques sous l'Empire romain).

 

LA VIE

Espérance de vie

C'est l'âge que l'on est en droit d'espérer à la naissance. Compte tenu de la mortalité infantile, il est évidemment inférieur à l'âge moyen des adultes au décès.

À toutes les époques, il se situe entre 27 et 30 ans; avec un maximum, au 6ème siècle, autour de 30 ans. La longévité ira en diminuant aux 5ème et 4ème siècles. * Empire romain : entre 20 et 30 ans.

Solon fixait la durée de vie d'un homme à 70 ans, Platon à 81 ans.

Cela n'a pas empêché certains Grecs d'atteindre 70 et 80 ans. Sophocle dépassa les 90 ans; l'orateur Isocrate atteignit 90 ans. La Grèce compta aussi des centenaires, par exemple le sophiste Gorgias, qui mourut entre 105 et 109 ans. Le Grec le plus âgé, connu par une inscription, a atteint l'âge de 110 ans (à l'époque moderne, l'âge maximum atteint par un Homme, vérifié et sans conteste possible, est de 122 ans).

Taux de natalité

C'est le nombre d'enfants qui dépassent l'âge d'un mois, sur mille habitants et sur un an.

30-33 %o au 6ème s.

 

UN VILLAGE DU BRONZE MOYEN (VERS 1700) - LERNE

On y a compté 120 maisons, occupées par des familles de 5 à 7 personnes, ce qui donne une population d'environ 800 habitants.

Chaque femme a accouché au moins de 5 enfants, soit un taux de natalité de 44-45 %o; mais une mortalité de 40 %o. Ce qui donne un taux d'accroissement naturel de 4 %o assez élevé pour une société préindustrielle

On y a retrouvé 234 squelettes, dont l'âge moyen était de 34 ans (hommes 37, femmes 31). 35 % des habitants étaient morts avant l'âge de 5 ans; 21 % entre 5 et 15 ans; 44 % seulement étaient des adultes au moment de leur mort.

 

LA SANTÉ DES ANCIENS GRECS

Le paludisme

Heureusement pour l'archéologue, la malaria laisse des traces sur les os. Ainsi, dès l'époque préhistorique, mais aussi à l'époque archaïque et classique, et plus fréquemment encore à l'époque hellénistique et romaine, on constate en Grèce la présence de cette maladie, dont les conséquences sont l'affaiblissement et l'impossibilité de tout travail soutenu. On estime entre 10 et 15 % la population atteinte par cette maladie, liée à la présence de terres marécageuses.

Les caries dentaires

Les habitants de la Grèce antique souffraient plus de la carie dentaire que les populations contemporaines d'Europe occidentale ou de l'Égypte. D'autre part, du Mésolithique au Néolithique, la carie diminue chez les populations européennes et nord-africaines, alors qu'en Grèce, elle augmente durant cette même période, pour redescendre ensuite et se stabiliser jusqu'à l'époque classique au niveau de 5 dents cariées et perdues pour 100 dents examinées, soit 4.0 lésions par bouche, dont 0.8 dent effectivement cariée par bouche.

Pour l'époque minoenne, à Cnossos et à Kato Zakro, ce taux est de 9 %. Pour l'ensemble de la Grèce mycénienne, on compte 6.5 lésions par bouche. Cependant les aristocrates de Mycènes n'avaient que 1.3 lésions par bouche (dont 0.8 carie), tandis qu'à Lerne, il y avait, à la même époque, jusqu'à 7 lésions par bouche (dont plus de 2 caries).

La carie est due au sucre dans l'alimentation (miel et fruits). Un auteur ancien se demandait déjà "pourquoi les figues, quand elles sont mûres et douces, gâtent<-elles> les dents ?"

Les infirmités

Compte tenu des accidents en tout genre qui pouvaient survenir, notamment les blessures de guerre et de chasse, et des limites de la médecine réparatrice d'alors, ainsi que de la cécité, on peut raisonnablement penser que plus de 10 % de la population grecque antique était infirme ou difforme.

Le stress

Le stress, notamment celui dû au travail, provoque la spondylarthrose, ou affection déformante des vertèbres. On peut donc archéologiquement mesurer l'importance du stress aux différentes époques.

Néolithique (Macédoine)

74%

Néolithique (Asie mineure)

61 %

Bronze ancien (Lycie)

62 %

Lerne : hommes

75 %

Lerne : femmes

50 %

Époques historiques (Grèce)

40 %

Cela prouve une nette amélioration des conditions de vie, et notamment du travail, à l'époque archaïque et à l'époque classique.

 

QUELQUES ÉLÉMENTS ANTHROPOLOGIQUES (Tirés de P. FAURE, Guide grec antique, pp. 14-15)

La race (V. Claude LÉVI-STRAUSS, Race et histoire ; Paris 1961) 

On distingue en Grèce antique au moins trois types humains et de nombreux métissages.

Groupes sanguins (V. Jean BERNARD, Le sang et l'histoire ; Paris 1983)

Les groupes sanguins sont encore plus stables que les caractéristiques physiques, et plus particuliers à une espèce donnée. On trouve actuellement en Grèce 63 % de Groupe 0, 28 % de A et 9 % de B, comme sur tout le pourtour de la mer Égée, ce qui implique une identité de peuplement.

Les empreintes digitales

Les empreintes digitales retrouvées sur les vases ou les tablettes d'argile de Mycènes révèlent une population très voisine de celles de l'Anatolie ou du Liban actuels. C'est qu'une grande partie des artisans se recrutaient parmi les Orientaux.

La taille moyenne des hommes en Méditerranée orientale (en cm)


hommes

femmes

Préhistoire

170

156

Néolithique I

168.5


Néolith.III - Bronze

166.5

154.5

7ème siècle avant J.-C.

169.8

156.3

époque hellénistique

171.8

156.6

 

Pour la Grèce de l'âge du Bronze II, on a les chiffres suivants:


hommes

femmes

Lerne

166.3

154.2

Pylos

167

152

Kato Zakro (Crète)

167

157.5

Mycènes, tombes royales

171.5

160

Mycènes, tombes en ville

166.5

155

On constate donc une très nette différenciation sociale du bien-être physique. Cela est dû au régime alimentaire des aristocrates, riche en protéines: les héros homériques mangent force rôtis, gigots et côtelettes.

 

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